Léviathan, la chute, de Lionel Davoust

Posted on 3 octobre 2011

Charmé par le premier roman de l’auteur, Lionel Davoust, l’occasion me fut donné de me pencher sur son nouveau livre. Changement d’horizon puisque on s’éloigne de la fantasy pour faire dans le thriller ésotérique. Lionel Davoust avait déjà démontré qu’il n’aimait pas les étiquettes, puisque son recueil de nouvelles, « L’importance de ton regard », le définissait déjà comme un touche à tout. Mais sommes-nous ici en présence d’un énième « Da Vinci Code » ou bien l’auteur est-il parvenu à s’éloigner des clichés pour nous faire sombrer dans une histoire palpitante ?

 

Quatrième de couverture :

1984, aux larges des côtes canadiennes. Surpris par une redoutable tempête hivernale, le ferry Queen of Alberta fait naufrage. Parmi les rares rescapés de cette catastrophe, le petit Michael Petersen, sept ans, a assisté à la disparition de ses parents.
2011, Los Angeles. Michael, désormais adulte et père d’un petit garçon, nourrit à l’égard de cette mer qui lui a tout pris une fascination mêlée de peur. Devenu chercheur en biologie marine, il se porte volontaire, malgré l’appréhension et la culpabilité d’abandonner les siens, pour une mission dans les glaces de l’Antarctique.

Or, il est loin de se douter que cette expédition suscite l’inquiétude au sein d une mystérieuse organisation séculaire, le Comité, dont les membres ont développé au fil du temps des pouvoirs infiniment supérieurs aux capacités humaines. Un de leurs agents, Masha, est personnellement chargé de veiller à la bonne marche d’une machination que le chercheur risquerait de mettre en péril. Ses directives sont claires : Michael ne doit jamais atteindre l’Antarctique.

Mais Masha refuse d’accomplir aveuglément sa mission : elle est bien déterminée à percer le secret qui entoure Michael. Car ce dernier représente pour elle plus qu’une simple cible…
D’Amérique en Antarctique, de complots en trahisons, Michael et Masha, alliés qui s’ignorent, devront combattre un ennemi bien plus terrifiant que la mort. Il leur faudra plonger en eux-mêmes et affronter leur propre part d’ombre, au risque se s’y perdre.

 

Main Droite ou Main Gauche ?

Le roman débute de la plus belle des manières : le prologue est particulièrement mystérieux, tandis que le début du premier est déjà palpitant. Belle accroche ! Ensuite, ça se calme, avec un long premier chapitre qui nous présente, de manière somme toute assez classique, les personnages principaux, leur entourage immédiat, certains des enjeux du récit et quelques fêlures issues de leur passé qui, bien sûr, prendront toute leur importance plus tard dans le récit. C’est plutôt long, limite convenu (notamment le personnage principal) mais toujours extrêmement agréable à lire.

La suite ne déroge d’ailleurs pas vraiment à ce constat : le roman prend le temps de s’installer, avec tout de même quelques passages un peu plus enlevés. Cette lenteur s’explique par la décision de l’auteur de s’immerger de manière assez complète dans la psychologie des deux personnages principaux : Michael Petersen et Masha Turgueniev. Et il est tout de même bien difficile de décrocher. Quand on arrête la lecture, on est comme à la fin d’un épisode de série télé, à l’issue duquel on se dit qu’objectivement il ne s’est passé grand chose, mais que malgré cela, on n’a pas vu le temps passé ! Gage de qualité sous une apparence de classicisme exacerbé (classicisme qui pourra vraisemblablement en gêner certains).

La deuxième moitié du roman appuie enfin sur l’accélérateur : les évènements longuement anticipés se produisent (et Michael Petersen devient nettement plus intéressant) , non sans quelques remous… Rien n’est simple, et le suspense est savamment entretenu, le fantastique fait de timides apparitions. Et surtout les pages tournent toutes seules ! Les mystères se précisent et s’épaississent à la fois : les personnages ne sont pas ce que l’on croit, l’environnement devient oppressant. A ce sujet, on sent que l’auteur aime la mer, qu’il la connaît, qu’il la côtoie. Il en fait une présence latente, toujours là, menaçante à plus d’un titre, attirante mais dangereuse, belle mais sournoise, familière mais changeante… La plume de Lionel Davoust y est pour beaucoup bien sûr, parfois sensible, parfois incisive, elle a toujours le ton juste, quelle que soit la scène décrite. Elle est à la fois belle et discrète, peut être un peu moins éxubérante que dans « La Volonté du Dragon », elle sait s’effacer derrière le récit (sans laisser tomber pour autant les phrases superbement ciselées), elle n’est là que pour le porter, de manière à ce que le lecteur ne se disperse pas, ébloui par des figures de style pas toujours utiles… Un style qui rend la lecture très accessible.

Et puis on arrive à la fin du roman. Et on s’aperçoit, tout au moins on se doute, que ce premier tome de la trilogie n’est qu’une introduction à quelque chose de beaucoup plus grand, qui éclatera dans les deux tomes suivants. Finalement Monsieur Davoust aura été sur le fil du rasoir tout du long : il aura réussi à ne donner que peu de clés au lecteur (en tout cas peu de clés immédiatement décelables…), tout en gardant son attention constamment (sans tomber dans les facilités du genre « Da Vinci Code » avec ses chapitres courts et ses cliffhangers toutes les 3 pages…). L’équilibre était délicat à obtenir, garder des billes pour la suite sans frustrer le lecteur. L’avenir nous dira si le pari est réussi, et si le choix de la trilogie était le bon, ou bien si deux tomes auraient été suffisants… Non pas qu’il y ait des longueurs, simplement on pourra trouver frustrant le peu de réponses apportées aux multiples questions que l’on se pose.

En tout cas, en tant que tel, ce premier volume se tient parfaitement. Réutilisant à bon escient les codes des thrillers à l’américaine, nul doute qu’il prendra une toute autre ampleur, mis en perspective avec les tomes suivants. Par ailleurs, dans un contexte difficile pour les nouvelles séries, l’auteur nous demande de lui faire confiance, et de ne pas attendre la suite pour vous lancer. Le deuxième opus arrive au printemps, ce n’est pas si lointain…

Vivement les Utopiales de Nantes pour que je puisse poser des questions à propos de certains éléments de ce livre et tirer quelques informations sur la suite à l’auteur, qui y sera présent… 😉

Chroniques à lire sur le Traqueur Stellaire, Yozone, Psychovision, Temps de Livres, Stef au pays des livres, Endea.

 

  
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