La station de l’Agnelle, de Jean-Claude Dunyach

Posted on 14 mars 2013

S’il est bien un novelliste francophone reconnu, c’est Jean-Claude Dunyach, considéré par beaucoup comme étant l’un des meilleurs, si ce n’est le meilleur. Lorsque j’ai vu que les recueils de l’auteur étaient disponibles en « streaming » (à défaut d’un terme plus adéquat) sur la plateforme Youboox sur iPad, j’ai sauté sur l’occasion de lire le premier volume.

 

Quatrième de couverture :

Bientôt mille ans que j’attends l’évènement : la Grande Conjonction, l’alignement de toutes les étoiles de la galaxie Dunyach dans un même chapelet de perles rares. Mille ans, c’est long ! Surtout qu’à chaque saison de chaque année d’autres astres éclosent et qu’il faudra aller les moissonner un peu partout dans l’univers.

Cueilleur d’étoiles. Des étoiles qu’on rit à chaudes larmes quand elles décrivent les habitudes migratoires des pères Noël, des étoiles qui se pleurent en silence aux abords de la station de l’Agnelle, des étoiles à vous glacer les neurones lorsque sonne l’heure des vers. Et en filigrane, dans chacun de leur noyau en fusion, une infinité d’histoires d’amour avec chute.

Dans ce premier opus, il y a tout ça, et plus. Il y a Jean-Claude Dunyach, le semeur d’étoiles.

Ayerdhal

 

Dunyach en nouvelles, tome 1

Composé de dix nouvelles, ce court recueil (124 pages) débute avec la nouvelle qui lui donne son nom, « La station de l’Agnelle ». Et là, direct, une claque. Et une grosse. Une nouvelle sublime, toute en délicatesse, sur la folie, le sacrifice pour le bien du plus grand nombre. C’est beau, c’est poignant, c’est magnifiquement bien écrit. Je ne sais quoi dire d’autre à vrai dire, mais c’est une des plus belles nouvelles que j’ai pu lire, et je la range bien précieusement au côté du « Conte de Suzelle » de Jean-Philippe Jaworski ou bien « Copeaux » de Thomas Geha, c’est dire sa qualité. « La station de l’Agnelle » ou comment toucher au sublime en seulement 10 pages.

Le problème du recueil, c’est que jamais plus il n’atteindra une telle qualité. Quand je dis cela, je parle uniquement des récits en eux-même car s’il y a bien une chose d’irréprochable chez Jean-Claude Dunyach, c’est sa qualité d’écriture. Ce recueil n’est pas un recueil thématique en tant que tel, mais le lien entre tous les récits reste bel et bien la qualité du style. C’est toujours au moins très bien écrit, avec une justesse et un style remarquables. Sauf que certaines des nouvelles du recueil, certes très poétiques, font parfois dans l’obscur, je n’ai pas toujours bien saisi où l’auteur a voulu m’emmener (« Les parallèles » ou bien « Histoire d’amour avec chute »). Comme si la « musique » de l’écriture prenait le pas sur le fond du récit. Parfois ça fonctionne, comme sur l’énigmatique mais très jolie « Le gardien de l’Ange », parfois moins (« Ce que savent les morts »). Sans doute une question de ressenti très personnel.

Les nouvelles sont parfois très courtes (3 ou 4 pages), mais c’est là ou l’auteur montre qu’il sait aussi faire dans l’humour : « L’heure des dédicaces » et surtout l’hilarante « Rapport sur les habitudes migratoires des pères Noëls » sont sans doutes anecdotiques mais malgré tout très réussies.

Jean-Claude Dunyach est à l’aise dans tous les styles, pour preuve la terrifiante nouvelle « L’heure des vers », sur un jeune garçon confronté à des fantômes devant la tombe de sa mère. Je vous laisse imaginer l’ambiance. C’est l’autre grande réussite du recueil.

Et enfin, le recueil se termine sur la plus longue nouvelle des dix, « Le jugement des oiseaux ». Et ça se termine sur une très bonne note, avec cette histoire d’enfants élevés pour tuer, qui reviennent auprès de leur « mentor » après s’en être longuement éloignés. Nouvelle à la fois touchante, inquiétante et mélancolique, toujours bien écrite (quelle surprise !), l’auteur nous offre à travers elle une belle réflexion sur la mémoire, l’immortalité, la famille. Une bien belle conclusion.

Au final, même si je n’ai pas entièrement adhéré à toutes les nouvelles réunies ici, il faut bien reconnaître que Jean-Claude Dunyach est un orfèvre. Tout est ciselé avec une belle maestria, finesse et justesse sont ici les maîtres mots. Et j’ai bien envie de dire que la nouvelle « La station de l’Agnelle » vaut l’achat du recueil à elle toute seule. Ceci dit, il y a dans les autres largement de quoi se sustenter, en fonction des goûts de chacun. Il existe six autres recueils du Monsieur, je vais sans doute y jeter un peu plus qu’un oeil…

 

Chronique écrite dans le cadre du challenge « JLNN » de Lune.

  
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