Roi du Matin, Reine du Jour, de Ian McDonald

Posted on 1 mai 2013

Je l’ai déjà dit (notamment avec le somptueux « Fleuve des dieux »), mais Ian McDonald m’apparaît comme étant l’un des acteurs majeurs de la littérature contemporaine de science-fiction. Alors quand il se penche sur la fantasy, avec son regard si particulier, cela ne peut qu’aiguiser mon appétit. Je vais donc ici tenter de faire un compte -rendu de lecture. Tenter car ce roman est thématiquement très riche (comme toujours avec McDonald), et car j’ai beaucoup tardé à écrire cette chronique. Il s’agissait en effet de la lecture commune du Cercle d’Atuan du mois de janvier… Procrastination, quand tu nous tiens… Heureusement, quelques notes de lecture ont survécu…^^

 

Quatrième de couverture :

Emily DesmondJessica CaldwellEnye MacColl, trois générations de femmes irlandaises, folles pour certains, sorcières pour d’autres. La première fréquente les fées du bois de Bridestone tandis que son père, astronome, essaie de communiquer avec des extraterrestres qu’il imagine embarqués sur une comète. La deuxième, jeune Dublinoise mythomane, se réfugie dans ses mensonges parce que la vérité est sans doute trop dure à supporter. Quant à Enye MacColl, katana à la main, elle mène un combat secret contre des monstres venus d’on ne sait où. Avec ce roman de fantasy raffiné et érudit, Ian McDonald revisite la mythologie celte avec talent.

 

L’évolution des mythes

Roman divisé en trois morceaux, trois périodes, et s’attardant sur trois femmes irlandaises, « Roi du matin, reine du jour » commence avec le personnage d’Emily Desmond, en 1913. Et ça commence de fort belle manière ! Ian McDonald utilise ici un style narratif que j’apprécie tout particulièrement : le style épistolaire. À travers des lettres envoyées par plusieurs personnages, des articles de presse ou bien le journal intime d’Emily (personnage central de cette partie mais aussi de tout le reste car les trois parties du roman sont bien sûr connectées), l’auteur parvient magnifiquement à fondre la réalité et les (possibles ?) fantasmes d’Emily, jeune fille un peu délaissée pas sa famille, entre une mère perdue dans l’écriture et un père astronome qui croit voir dans le passage d’une comète l’annonce de la venue d’extraterrestres du système Altaïr. Dans une Irlande du début du XXème siècle, aux croyances « païennes » encore importantes, difficile de ne pas faire de rapprochement entre les apparitions vécues par Emily et l’affaire des fées de Cottingley, dans laquelle s’était impliqué Arthur Conan Doyle.

La deuxième partie s’attarde sur Jessica Caldwell, dans les années 30 et une Irlande qui tente de se remettre de la guerre civile. Là encore, alors que McDonald change radicalement de style, mythes et réalités se confondent, notamment à travers les apparitions de Gonzague et Tirésias, le Guetteur et le Fileur de Rêves, deux personnages fascinants car à la fois proches et pourtant bien difficiles à cerner.

Enfin, après un intermède de quelques pages, composé de phrases à la longueur rarement vue, arrive la dernière partie s’intéressant cette fois à Enye MacColl. Nouveau changement de style, beaucoup plus dynamique (il faut dire qu’Enye se ballade le soir armée d’un katana pour chasser les démons !), avec un contexte situé toujours en Irlande, dans les années 80. On mélange allègrement mythes celtiques revisités, mangas et culture pop années 80. C’est réjouissant, frais, et l’imagination de Ian McDonald fait merveille ! Ces mythes qui, tout en restant au fond les mêmes, évoluent pour refléter la société dans laquelle ils baignent, se présentant sous des atours étonnants, sont une belle réussite du roman.

Au final, tout l’ouvrage se tient, et à la fin de la dernière partie (avant un amusant épilogue en forme de pied de nez), après un dernier combat dantesque, la boucle est bouclée, et la cohérence de l’ouvrage apparaît de façon remarquable. Un roman de fantasy subtile, avec un trio d’héroïnes intéressantes et attachantes. Je suis personnellement toujours aussi convaincu par Ian McDonald qui ne me déçoit décidément pas. C’est un auteur qui n’est certes pas toujours facile à appréhender (ceux qui n’arrivent pas à apprécier n’y arriveront sans doute pas plus avec ce roman…), mais quand on arrive à s’y plonger, c’est toujours pour un moment étrange, étonnant et gratifiant.

 

Voir aussi les avis de EfelleIsilVertCachouSylpheJules AthouniJulien le naufragé.

  
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