7 secondes pour devenir un aigle, de Thomas Day

Posted on 3 octobre 2013

L’occasion fait le larron ! C’est en effet à l’occasion du passage de l’auteur, Thomas Day, à la librairie Critic de Rennes que j’ai acheté (et donc fait dédicacer) son tout nouveau (et tout beau : admirez cette splendide couverture !) recueil. Six nouvelles accompagnées d’une postface signée Yannick Rumpala, le tout ayant pour thème commun l’écologie.

 

Quatrième de couverture :

Une île du Pacifique à la fois tombeau de Magellan et unique territoire d’un arbre à papillons endémique…

Un homme au visage arraché par un tigre mais qui continue de protéger « la plus belle créature sur Terre », coûte que coûte…

Un Sioux oglala sur le chemin du terrorisme écologique…

Un trio de jeunes Japonais qui gagne sa vie en pillant la zone d’exclusion totale de Fukushima…

Des Aborigènes désoeuvrés cherchant dans la réalité virtuelle un songe aussi puissant que le Temps du Rêve de leur mythologie…

Une Terre future, post-Singularité, inlassablement survolée par les drones de Dieu…

 

Et 6 nouvelles pour convaincre

7 secondes pour devenir un aigle DayN’y allons pas par quatre chemins, décortiquons les six nouvelles au menu.

Mariposa : un style que j’affectionne (quasiment épistolaire), une nouvelle à plusieurs voix, et un récit assez touchant (et symboliquement fort) liant deux ennemis appelés à un destin beaucoup plus noble que ce qu’ils imaginaient. Un texte très réussi, parvenant en peu de mots à faire naître des émotions et de belles images dans la tête du lecteur. Touché !

7 secondes pour devenir un aigle : un titre sensationnel (le titre de l’année ?) pour un récit percutant sur le terrorisme écologique (faisant écho à « Demain, une oasis » d’Ayerdhal et son terrorisme humanitaire), ou la lutte d’un amérindien prêt à tout pour sauvegarder sa terre et punir ceux pour qui le profit importe avant tout.

Éthologie du tigre : une nouvelle que j’avais déjà lue dans le recueil « L’O10ssée FolioSF » jamais chroniqué (car ce blog n’existait pas à l’époque, du moins pas sous cette forme), mais qui m’avait laissé plutôt perplexe, voire même froid. Preuve que les goûts évoluent (ou l’expérience de lecteur, allez savoir !), cette fois-ci elle est nettement mieux passée ! Entre descriptions sentant le vécu à plein nez et récit bien construit, le propos écologique à deux niveaux, amené en finesse, est très réussi.

Shikata ga nai : la subsistance d’un trio de marginaux en zone hostile. Une nouvelle qui se rapproche d’un « Stalker » réaliste puisqu’elle a pour cadre Fukushima et sa zone d’exclusion (une grosse dizaine d’années après « l’incident »), théâtre de larcins qui n’en sont plus (mais restent source de revenus) puisque plus personne n’y habite. Court mais tellement crédible que ça en devient glaçant…

Tjukurpa : la petite déception du recueil. Deux intrigues liées (des aborigènes d’Australie qui tentent de recréer virtuellement un Australie pure comme avant l’arrivée de l’homme blanc, devenant ainsi les nouveaux dieux d’un nouveau Temps du Rêve, Tjukurpa en langue aborigène, et ces mêmes aborigènes qui « nettoient » à leur manière leur pays), mais une nouvelle qui peine à décoller et à passionner. Dommage.

Lumière noire : la plus longue nouvelle du recueil, une centaine de pages. Un récit post-apocalyptique, sorte de remake de « Terminator » pour l’IA qui échappe à tout contrôle, mais cette IA a un but bien précis. Un récit à la fois sombre et porteur d’espoir, détaillé et palpitant.

Enfin, un petit mot sur la postface de Yannick Rumpala sur l’anthropocène qui, à l’aune des derniers rapports écologiques, prend un sens tout particulier. Et la science-fiction d’avoir un rôle important à jouer dans les orientations futures des modes de vie et des évolutions technologiques, pour le bien de tous.

Au final, on a là un recueil de grande qualité. Ce que j’aime dans les récits de Thomas Day, ce qu’ils sont toujours très documentés, référencés (c’était déjà le cas dans son roman « L’instinct de l’équarrisseur » par exemple), soit historiquement, soit dans leurs liens avec l’actualité. Ils font travailler le lecteur (je ne compte plus le nombre d’articles lus sur des sujets divers et variés apparaissant dans les textes de l’auteur), et j’adore ça. Sans compter qu’ils sont toujours porteurs d’un message. Olivier Girard, directeur des éditions du Bélial, nous dit dans l’avant-propos que :

Thomas a longtemps hurlé. Désormais il suggère, montre et démontre en mille nuances. Sa voix n’en a que davantage de poids.

Je ne peux qu’abonder dans le même sens, et ajouter que Thomas Day s’inscrit très clairement dans la short-list des auteurs de poids de la littérature de l’imaginaire francophone. A lire !

 

Lire aussi les avis de Efelle, Bibliocosme.

 

Chronique écrite dans le cadre du challenge « JLNN » de Lune.

 

  
FacebooktwitterpinterestmailFacebooktwitterpinterestmail