La porte d’Abaddon, de James S.A. Corey

La série « The expanse » ne manque pas de charme. Il y a d’abord eu le très sympa « L’éveil du Léviathan », puis « La guerre de Caliban »,  un ton au-dessous mais toujours vif et enlevé. On en arrive donc au troisième tome, « La porte d’Abaddon », Sorte de conclusion d’un cycle pour mieux en ouvrir un nouveau. Encore faut-il que cette conclusion soit à la hauteur et incite à aller voir plus loin…

 

Quatrième de couverture :

Pendant des générations, le système solaire – Mars, la Lune, la ceinture d’astéroïdes – fut la grande frontière de l’humanité. Jusqu’à maintenant. Un objet non identifié opérant sous les nuages de Vénus est apparu dans l’orbite d’Uranus, où il a construit une porte massive qui mène à un hyperespace désolé.
Jim Holden et l’équipage du Rossinante font partie d’une vaste flotte de navires scientifiques et militaires chargés d’examiner le phénomène. Mais une intrigue complexe se trame dans leur dos, visant à l’élimination pure et simple d’Holden. Les émissaires de la race humaine en sont à devoir décider si la porte est une opportunité ou une menace, sans imaginer que le plus grand danger est peut-être celui qu’ils ont apporté avec eux.

La Porte d’Abaddon est le troisième volet de la désormais célèbre série The Expanse, plus explosive que jamais.

 

Vers l’infini et auuuuuuu-delà !

la-porte-dabaddon-corey-couverturePremière constatation : les tristounettes illustrations de couverture des deux tomes précédents ont été abandonnées au profit de l’illustration du roman VO (signée Daniel Dociu), autrement plus attirante. Bonne idée. Le traducteur en revanche, Thierry Arson, reste fidèle au poste.

Et donc, après la fin du tome 2 de la série qui m’avait laissé sur les dents, nous retrouvons les personnages que nous avons appris à aimer (ou pas, mais dans ce cas-là, ce n’est pas la peine d’insister je crois…), avec ce contexte géopolitique toujours aussi intéressants et ces trois grandes forces qui se regardent en chiens de faïence : la Terre, Mars, et l’Alliance des Planètes Extérieures. Ces trois entités vont se retrouver face à un événement inattendu : l’apparition au-delà de l’orbite d’Uranus d’un énorme anneau, issu de la protomolécule opérant sous les nuages de Vénus. Anneau qui n’est rien d’autre qu’une porte qui mène… ailleurs. Tout le monde va bien sûr y envoyer des émissaires (qu’ils soient militaires, scientifiques ou simples observateurs), aussi bien pour étudier le phénomène que pour surveiller ce que font les autres. Jusqu’à ce qu’un hurluberlu décide de foncer à travers l’anneau, à la recherche d’un moment de gloire (qui s’avérera bien court d’ailleurs…). Ce sera l’élément déclencheur, auquel il faut y ajouter une machination visant James Holden, d’une série d’événements qui vont faire sauter en éclats ce statu-quo et forcer l’humanité à un peu d’exploration spatiale là où mène de fameux anneau, la porte d’Abaddon.

Alors oui, tout cela est diablement excitant. Le roman débute d’ailleurs sur les chapeaux de roues : rythme trépidant, un mystère qui fait partie de ceux que j’adore en space-opera (ce fameux « big dumb object », dont le plus célèbre représentant et peut-être le plus réussi est bien sûr celui présent dans « Rendez-vous avec Rama » de Arthur C. Clarke), et un potentiel absolument vertigineux pour la suite du roman et de la série. Et puis… il faut bien avouer que les promesses ont du mal à être tenues. En tout cas pour le roman. On a un peu l’impression que les auteurs (rappelons que James S.A. Corey est un nom de plume pour le duo Daniel AbrahamTy Franck) ont eu une super idée mais sans trop savoir quoi en faire. On plutôt qu’ils connaissaient le point de départ et le point d’arrivée du roman, mais avec bien peu de matière entre les deux pour arriver à l’objectif d’un roman de 600 pages. Résultat : c’est long, parfois très long. Il faut dire que les personnages de ce roman, hormis le bien connu équipage du Rossinante, n’ont pas le charme de ceux des volumes précédents, notamment du deuxième (qui se souvient d’Avasarala imagine bien la difficulté de la tâche des auteurs). Ainsi Bull, le chef de la sécurité du Béhémoth, ce vaisseau générationnel volé aux Mormons, reste sympathique (c’est sans doute le plus réussi des nouveaux protagonistes) mais sonne un peu comme déjà vu. De même pour Melba Koh et son désir de vengeance (sa nature un poil schizophrène avait pourtant de quoi séduire). Le pompon revient à Anna Volovodov, personnage censé amener un peu de réflexion sur le destin de l’humanité, comment faire face à l’inconnu, etc… mais dont le côté religieux a finit par sérieusement m’ennuyer. Dommage, d’autant plus que l’intention de présenter à travers ces trois personnages trois facettes d’une humanité confrontée à l’inconnu était fort louable.

Mais que reste-t’il alors ? Peu et beaucoup à la fois. L’intrigue globale, même délayée sur 600 pages (manquant ainsi singulièrement de sense of wonder, je reste persuadé qu’en étant plus ramassée, elle aurait pu être tellement plus vertigineuse) ne manque pas d’attrait (même sans être foncièrement originale, les connaisseurs de la série de jeux vidéo « Halo » ne manqueront pas de voir quelques ressemblances par exemple), certains passages réussis et haletants (même si parfois trop longs, comme la dernière bataille, et trop prévisibles également, surtout quand on a lu « Arca » il y a peu de temps, l’effet de redite est un peu violent), certaines surprises également que je n’avais pas vues venir relancent l’intérêt du lecteur (les actes d’Ashford notamment, le capitaine du Béhémoth). Mais il faut avouer que tout cela est bien long. Le plus étrange c’est que ce roman offre des perspectives véritablement vertigineuses pour la suite de la série (qui risque tout de même d’y perdre au passage son aspect volontairement « étriqué » qui faisait une bonne partie de son charme et de son réalisme, mais tout enfant doit grandir un jour et sortir de son nid…) et qu’à ce titre sa lecture reste indispensable pour qui a l’intention d’aller plus loin dans la série.

Suite que j’espère au niveau des attentes soulevées par la conclusion du roman, car elle a tout pour être vraiment très excitante. Wait & see donc, et malgré ce troisième tome un peu bancal, je répondrais à nouveau présent pour découvrir à quoi sera confrontée l’humanité et le devenir de l’équipage du Rossinante.

 

Lire aussi les avis de Gromovar, Anudar, Apophis, Olivia Lanchois.

 

  
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