Défaite des maîtres et possesseurs, de Vincent Message

Posted on 10 janvier 2017
Les critiques DITHYRAMBIQUES de ce roman avaient attiré mon attention ces derniers mois, avec le sentiment que si je ne lisais pas je risquais de passer à côté de quelque chose d’important. Et ça, pas question ! Et donc, roman lu en moins de deux jours. Un signe sans doute…

 

Quatrième de couverture (attention, spoilers en fonction des sensibilités à ceux-ci) :

Iris n’a pas de papiers. Hospitalisée après un accident de voiture, elle attend pour être opérée que Malo Claeys, avec qui elle habite, trouve un moyen de régulariser sa situation. Mais comment la tirer de ce piège alors que la vie qu’ils mènent ensemble est interdite, et qu’ils n’ont été protégés jusque-là que par la clandestinité ?

C’est notre monde, à quelques détails près. Et celui-ci notamment : nous n’y sommes plus les maîtres et possesseurs de la nature. Il y a de nouveaux venus, qui nous ont privés de notre domination sur le vivant et nous font connaître le sort que nous réservions auparavant aux animaux.

Plongeant dans un des enfers invisibles de notre modernité, retraçant l’histoire d’un amour difficile, « Défaite des maîtres et possesseurs » nous entraîne dans une fable puissante où s’entrechoquent les devenirs possibles de notre monde.

 

Changement de paradigme

defaite-des-maitres-et-possesseurs-message-couvertureParfois, il est des romans pour lesquels en dire trop les dessert totalement. C’est le cas ici, à la puissance mille. La quatrième de couverture tente de contourner cet écueil en restant évasive mais déjà je trouve qu’elle va un peu trop loin. Alors que dire ? Car parler des thèmes abordés par le roman (et ils sont nombreux) et de la façon dont ils le sont revient nécessairement à dévoiler ce que je ne veux pas dévoiler. Et que le roman ne dévoile, lui, en partie qu’au chapitre 2. Le premier chapitre plonge donc le lecteur dans un flou volontairement entretenu, un flou qui ne se lève que petit à petit, au fil des chapitres et des explications amenées par le personnage principal, Malo Claeys.

Ecologie, économie, guerre, domination, agroalimentaire, exploitation des ressources, tous ces thèmes sont abordés de manière intelligente, parfois en quelques lignes, parfois sur un chapitre entier. A ce titre, le chapitre 6 est sans doute le « chapitre-bascule » du roman, celui qui vous met une grosse claque sans prendre de gant. A partir de là, rien n’est plus pareil, et si jusqu’ici on avait pu se dire « oui, c’est un roman qui dénonce, le propos est intéressant mais rien de neuf sous le soleil », après ce chapitre, impossible de regarder les choses de la même manière. Oh je ne suis pas un saint et ne prétendrai pas que le roman va me faire changer radicalement ma façon de vivre, mais déjà ouvrir les yeux est un premier pas.

Interrogeant la place de l’Homme dans le vaste univers, remettant en question ses penchants destructeurs (et donc notre société dans son ensemble) quand bien même ils semblent être pour le bien du plus grand nombre, « Défaite des maîtres et possesseurs », en imposant un total changement de paradigme sociétal (mais finalement, change-t-il vraiment, ou bien n’est-ce qu’un ajustement des plus forts et des plus faibles ?), frappe juste et fort.

Encore une fois, difficile d’en dire plus sans vendre la mèche, je ne peux même pas m’appuyer sur le titre très bien trouvé du roman qui peut s’entendre de différentes manières… J’ajoute tout de même qu’au delà du propos engagé, le roman n’oublie pas d’être un roman, il y a une intrigue, une jolie histoire d’amour mêlant altérité et générosité, dramatique aussi, d’abord située en retrait puis qui prend toute son importance.

J’ai bien conscience de rester à la marge du roman, et donc par la force des choses de faire court, mais c’est tout à fait volontaire. J’en appelle donc à la confiance des lecteurs : lisez ce roman (qui sortira en poche en février, à bon entendeur…) en le prenant pour ce qu’il est, c’est à dire un roman de littérature générale utilisant certains codes de la SF (oui c’est donc aussi un vrai livre de SF) pour faire passer un message (avec un nom pareil, Vincent Message pouvait difficilement faire autrement…^^). Et croyez-moi, il le fait bien, parfois de manière brutale, frontale (au risque que ça ne fonctionne pas sur tout le monde), mais pour ma part le message passe. C’est sans doute que le but est atteint. Et utiliser un contexte situé dans un avenir plus ou moins proche et plus ou moins probable pour interroger notre présent et mettre nos défauts en lumière en appuyant là où ça fait mal, n’est-ce pas aussi de ça qu’est faite la bonne et grande SF  ?

 

Lire aussi les avis de YogoSandrine, Cachou, Charybde2, La fille qui n’aimait rien, Un dernier livre, Mots pour mots.

 

  
FacebooktwitterpinterestmailFacebooktwitterpinterestmail