L’île des morts, de Roger Zelazny

Posted on 15 août 2012

Comme en témoigne les quelques chroniques déjà parues, Roger Zelazny est un auteur qui m’intéresse. Écrivain majeur de SF de la deuxième moitié du siècle dernier, les thématiques qu’il reprend fréquemment sont parmi celles qui, je ne sais trop pourquoi, me captivent : immortalité, divinités, mythologies. Voici donc une nouvelle lecture d’un auteur malheureusement un peu trop oublié de nos jours…

 

Quatrième de couverture :

XXXIIesiecle. Francis Sandow est le doyen de l’humanité, le seul homme en vie à avoir connu le XXe siècle.

Il est aussi l’une des cent plus grosses fortunes de la galaxie et l’un des vingt six Noms — l’avatar d’un dieu ancien, Shimbo de l’Arbre Noir.

Francis Sandow est un démiurge, un faiseur de mondes. Aujourd’hui, il vit sur Terre Libre, un des univers qu’il a créé. Mais sa retraite est troublée par un mystérieux inconnu, qui possède le pouvoir de ressusciter tous ceux que Sandow a connus au cours des siècles. Parmi lesquels Kathy, son premier et unique amour… rendez-vous est pris sur l’île des morts, ce lieu que Sandow a façonné jadis et qui échappe désormais à son contrôle…

 

Court et direct

192 pages. C’est la taille de ce roman.Et comme chacun sait, la taille importe peu (hum…), et ce roman en est la preuve éclatante, car ces 192 pages vont droit à l’essentiel, sans fioritures, pour en faire au final un excellent récit, utilisant une nouvelle fois avec talent quelques uns de ses thèmes favoris comme la divinité ou la mythologie.

Francis Sandow est un faiseur de mondes. Il a adhéré à la religion du strantrisme, et est devenu le premier humain ordonné grand prêtre de cette religion  (après un apprentissage d’une cinquantaine d’années) et Porteur d’un Nom. A ce titre, il bénéficie d’un lien tout particulier avec l’un des nombreux dieux de cette religion, Shimbo de l’Arbre Mort. Et a obtenu la possibilité de créer des mondes, ce qui lui a rapporté beaucoup d’argent puisqu’il est également l’un des hommes les plus riches de la galaxie.

On le voit, Francis Sandow est un quasi-dieu. Capable de créer des mondes entiers, il possède un incommensurable pouvoir. Pourtant, il reste avant tout un homme, avec ses préoccupations très humaines. Il est riche, très riche, il s’est donc fait des ennemis. Et pour se protéger, il s’est retranché sur un monde qu’il s’est créé lui-même, avec des serviteurs dévoués (en tout cas tant qu’il les paie suffisamment). Jusqu’au jour où il va devoir sortir de sa retraite dorée lorsque qu’un ennemi inconnu lui envoie des photos de proches aujourd’hui disparus…

Avec une certaine économie de moyens, Roger Zelazny parvient à faire naître des images vertigineuses dans l’esprit du lecteur. Economie de moyens car l’auteur ne décrit qu’assez peu son univers, par petites touches, quelques petites digressions ici ou là dans les pensées de Francis Sandow. De même pour la cosmogonie du strantrisme,  très importante dans le roman et pourtant à peine effleurée. Pourtant cela fonctionne très bien, ma curiosité a été piquée au vif, et mon imagination a fait le reste. Cela vaut aussi pour le personnage de Francis Sandow. On en sait finalement assez peu sur lui, sur son passé pourtant visiblement riche et tumultueux, mais là encore ça fonctionne, car Zelazny indique juste ce qu’il faut pour faire nous faire voyager. Là où cela avait pu me gêner un peu dans « Le maître des ombres », ce n’est absolument pas le cas ici. Mais que l’éventuel lecteur sache tout de même que s’il est absolument à la recherche d’un monde riche, détaillé, fouillé, autant qu’il passe son chemin tout de suite, car il ne trouvera pas son bonheur ici.

Une autre des grandes réussites de ce roman est le style de Zelazny. Extrêmement fluide, il est bien difficile de lâcher le récit et de ne pas le lire d’une traite. Qu’il est agréable de lire un roman qui, tout en suivant une trame assez simple, se permet de faire voyager le lecteur aussi loin !

Roger Zelazny a donc encore réussi son coup. Et je regrette encore plus maintenant de voir que cet auteur semble être oublié en France. Quelqu’un finira-t’il par nous faire une belle intégrale de l’auteur ? Au moins de ses nouvelles (il me semble que l’éditeur « Lunes d’Encre » en avait parlé à une époque)… Et il serait bon également de rééditer certains de ses romans (en dehors du célèbre cycle des « Princes d’Ambre ») qui commencent à être difficiles à trouver de nos jours (y compris celui-ci). En tout cas, je compte bien me diriger très prochainement vers la suite de ce roman, « Le sérum de la déesse bleue », qui lui aussi fait dans le format court (même taille que « L’île des morts »).

Chronique écrite dans le cadre du challenge « Summer Star Wars, épisode VI » de Lhisbei.

  
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