Gwendy et la boîte à boutons, de Stephen King et Richard Chizmar

Posted on 31 janvier 2019
On ne présente plus Stephen King. Et même si je l’ai beaucoup lu durant l’adolescence, je dois avouer l’avoir perdu de vue depuis pas mal d’années (ça me rappelle d’ailleurs qu’il faut que je me remette sérieusement  àla lecture de « La tour sombre »). J’ai pourtant le souvenir de quelques romans et nouvelles marquants (lisez « les langoliers » dans le recueil « Minuit 2 » !). Du coup, reprendre contact avec le King à travers un court texte, lui qui nous sort des pavés régulièrement, c’est un petit plaisir que je ne pouvais pas refuser.

 

Quatrième de couverture :

Trois chemins permettent de gagner Castle View depuis la ville de Castle Rock : la Route 117, Pleasant Road et les Marches des suicidés. Comme tous les jours de cet été 1974, la jeune Gwendy Peterson a choisi les marches maintenues par des barres de fer solides qui font en zigzag l’ascension du flanc de la falaise. Lorsqu’elle arrive au sommet, un inconnu affublé d’un petit chapeau noir l’interpelle puis lui offre un drôle de cadeau : une boîte munie de deux manettes et sur laquelle sont disposés huit boutons de différentes couleurs.

La vie de Gwendy va changer. Mais le veut-elle vraiment ? Et, surtout, sera-t-elle prête, le moment venu, à en payer le prix ? Tout cadeau n’a-t-il pas sa contrepartie ?

 

Une petite douceur du King

Quand on lit du Stephen King, on s’attend à du frisson, de l’horreur, du fantastique terrifiant. Mais ce n’est pas toujours le cas, loin s’en faut. Et si le fantastique est présent dans « Gwendy et la boîte à boutons », au moins pas la bande, de manière assez discrète, pour ce qui est du terrifiant autant aller voir ailleurs. Car cette novella d’à peine plus de 150 pages (avec une typo plutôt généreuse et quelques illustrations, le format aurait donc tout à fait pu convenir à, au hasard, la collection « Une heure-lumière » du Bélial’ mais bon il faut bien laisser quelques (très belles) miettes aux concurrents… 😉 ) fait l’effet d’une petite douceur.

On y découvre l’attachant personnage de Gwendy Peterson, jeune ado un peu ronde et qui, pour ne plus subir les railleries de ses camarades, décide de faire un peu de sport en grimpant les Marches des suicidés pour atteindre Castle View depuis la ville de Castle Rock. Là elle y rencontre un mystérieux personnage qui lui offre une boîte en acajou sur laquelle se trouve quelques boutons colorés mais aussi deux manettes, l’une donnant de petits animaux en chocolat, l’autre un dollar Morgan. L’homme, nommé Richard Farris, reste très évasif sur l’utilisation de cette boîte (semble-t-il capable d’apporter le bonheur comme la destruction), mais devant son insistance (elle est « l’élue »), Gwendy repart avec elle sous le bras. Cette boîte, d’apparence anodine, risque pourtant de prendre une place prépondérante dans sa vie…

Certains verront dans ce début d’histoire une forte ressemblance avec une nouvelle de Richard Matheson, « Le jeu du bouton », sans doute pas tout à fait fortuite. Mais là où le récit de Matheson se basait uniquement sur ce concept de boîte, assimilée à celle de Pandore, métaphore de l’attrait du pouvoir et de la tentation, le récit de King et Chizmar va plus loin puisqu’il fait le récit de la vie de Gwendy Peterson. Le parallèle avec Pandore reste valable puisque l’utilisation d’un bouton semble avoir de graves conséquences (métaphore du bouton nucléaire aux mains de personnages instables comme peut l’être une enfant ?), alors que l’attrait du pouvoir reste présent avec ce bouton qui peut faire tout ce que souhaite l’utilisateur. Mais le personnage de Gwendy est un vrai plus car les auteurs parviennent à la rendre particulièrement attachante. On suit son quotidien, d’année en année, avec ses tracas, ses satisfactions, etc… Une jeune fille au départ banale et qui finalement arrive à être presque trop parfaite. Influence de la boîte « bien » utilisée par Gwendy ? Allez savoir, on peut d’ailleurs même se demander, arrivé à la conclusion absolument parfaite et logique (mais qui ne répond à quasiment aucune question, et c’est aussi bien ainsi), si cette boîte était bien réelle ou simplement un fantasme d’enfant qui disparaît lors du passage à l’âge adulte, un passage qui se fait dans la douleur avec une Gwendy forcée de grandir en affrontant un drame… Après tout, qui d’autre qu’elle a vu ce Richard Farris (dont les initiales titilleront les amateurs de Stephen King, et qui fait bigrement penser à un personnage d’un autre excellent roman de King, du temps où je le lisais, à savoir Leland Gaunt de « Bazaar », roman qui se déroulait d’ailleurs lui aussi à Castle Rock) ?…

En tout cas, ce petit récit (par la taille mais non par la qualité) se lit avec une remarquable aisance et, sous couvert d’une chronique somme toute assez légère de la vie adolescente, se permet d’aborder de nombreuses thématiques (harcèlement, tentation, pouvoir, responsabilités, libre-arbitre, destin et déterminisme…). Et c’est même à regret que l’on quitte Gwendy, une jeune fille pleine de caractère et les pieds sur terre, qu’on aurait aimé suivre quelques années de plus… Une excellente novella donc, qui montre à nouveau que ce format mériterait d’être pleinement réhabilité (work in progress…) dans notre pays. Excellent !

 

D’autre avis ? Stephen King oblige, Internet en regorge !

 

  
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