Pierre-de-vie, de Jo Walton
Quatrième de couverture :
Applekirk est un village rural situé dans les Marches, la région centrale d’un monde où le temps ne s’écoule pas à la même vitesse selon que l’on se trouve à l’est – où la magie est très puissante et où vivent les dieux – ou à l’ouest – où la magie est totalement absente.
C’est la fin de l’été, et la vie s’écoule paisiblement pour les villageois. Mais le manoir va être mis sens dessus dessous par le retour de Hanethe, qui fut autrefois la maîtresse des lieux. Partie en Orient, elle y est restée quelques dizaines d’années. Mais, plus à l’ouest, à Applekirk, plusieurs générations se sont succédé. Ayant provoqué la colère d’Agdisdis, la déesse du mariage, Hanethe la fuit. Mais Agdisdis est bien décidée à se venger.
Subtil roman de fantasy – prix Mythopoeic en 2010 –, Pierre-de-vie dresse le portrait de femmes simples et merveilleuses, d’une famille sans histoires mais singulière, confrontées à des changements qui les dépassent, dans un monde hors du commun.
Domestic fantasy
Un écoulement du temps différent selon la situation géographique, une magie variable sur les mêmes principes, et des personnages passant d’une région à l’autre avec donc des effets temporels les amenant à vivre à un « vitesse différente » que les personnes qu’ils quittent (ou retrouvent), voilà qui a de quoi émoustiller l’amateur de littérature de l’imaginaire, à plus forte raison quand il s’agit de Jo Walton dont la qualité d’écriture n’est plus à démontrer.
Oui, sauf que. Il ne faudrait pas s’attendre ici à de la fantasy « épique » avec moults paradoxes temporels, effets magiques spectaculaires, etc… Jo Walton ne verse pas dans ce genre de récits. C’est sans doute ce que j’aurais dû me dire avant d’entamer ce roman, tant je dois avouer que mes attentes n’ont pas vraiment correspondu avec ce que j’ai lu. D’autant plus qu’ici, l’autrice reste volontairement axée sur un cercle très restreint, à savoir le petit village d’Applekirk, situé dans les Marches (grosso modo à équidistance de l’Ouest où le temps s’écoule lentement et où la magie n’existe pas, et de l’Est où c’est tout l’inverse).
Les gens d’Applekirk, comme dans tout village relativement isolé et éloigné des grands cités, vivent leur vie tranquillement, sans trop se soucier de ce qui se passe dans le grand monde. La magie y est présente à petite dose (faire léviter des objets est bien le plus spectaculaire qu’on puisse y trouver, le reste repose plutôt sur des charmes du genre protection des maisons, purification de l’eau, etc…), et les habitants mènent leur train-train quotidien, se satisfaisant d’avoir trouvé leur « pierre-de-vie » c’est à dire le métier ou la fonction qui leur permettent de s’épanouir au mieux, le tout dans un fort respect mutuel, sur le plan professionnel comme personnel, avec en plus dans ce dernier cas l’acceptation d’un mode de vie très ouvert, basé sur le « polyamour », c’est à dire couples libres, plus ou moins mélangés. Mais tout le monde ne vit pas de la même manière, et à l’Ouest, où la magie prend une immense place, la déesse du mariage Agdisdis ne voit pas ce polyamour d’un très bon oeil, et l’affront qu’elle jugera avoir subi de Hanethe, cette dernière décidant pour se protéger de revenir à Applekirk, village qu’elle a dirigé il y a bien longtemps (et que les habitants actuels ne connaissent pas, décalages temporels obligent), risque fort de briser la tranquillité du village.
Alors oui, c’est vrai, Jo Walton joue avec le temps, c’est même un peu la base de l’intrigue. Mais elle le fait par petites touches discrètes, cet effet reposant presque plus sur des techniques d’écriture particulières que sur des « effets visuels ». La narration n’est donc pas linéaire et le passé, le présent et même l’avenir se mélangent, le tout sur un texte conjugué quasi exclusivement au présent. C’est assez déboussolant, pas toujours facile à suivre (surtout que Taveth, personnage principal(e) du récit, a le pouvoir de voir les gens à différents moments de leur vie, passée ou future), du moins au début, mais cela représente finalement assez bien ces effets temporels.
Et le récit reste donc cantonné à Applekirk. Les enjeux ne semblent du coup pas être très importants, mais derrière tout cela, il y a quand même des vies humaines, des divinités et de l’action, quand bien même dès lors qu’on parle d’un siège, celui-ci se fasse avec 80 soldats. Le roman porte donc bien son qualificatif de « domestic fantasy » puisque tout ou presque y est ramené au village, voire à la famille. Mais si l’échelle adoptée par Jo Walton semble restreinte, les parties prenantes du récit restent pour l’essentiel les mêmes que dans tout bon récit de fantasy, en explorant de plus de riches thématiques (l’amour, la religion, la place que chacun doit trouver au sein d’un plus grand ensemble…).
« Pierre-de-vie » a donc tous les atours d’un roman de qualité, et c’est ce qu’il est en étant le plus objectif possible. Sur un plan tout à fait subjectif, ce n’était pas ce à quoi je m’attendais mais c’est totalement de ma faute et j’aurais dû réfléchir deux minutes avant de m’imaginer des trucs. Ne tombez donc pas dans le même piège que moi et lisez « Pierre-de-vie » pour ce qu’il est avant tout : une histoire universelle, maîtrisée et bien écrite, joliment illustrée en couverture par Aurélien Police et traduite avec classe par Florence Dolisi.
Lire aussi les avis de Lune, Cédric, Célindanaé, Boudicca, Litote, Culturevsnews, Acr0, Tigger Lilly, Vert.
J’étais intéressée quand Tigger Lilly et Vert ont publié leurs avis, mais en fait à la réflexion je pense que ce roman n’est pas pour moi: je pense que je ne comprendrais rien à au temps et aux filiations. Mais ça a l’air bien, tout de même. Je lirai autre chose de Jo Walton un jour.
En fait ça n’a rien de compliqué au niveau de l’écoulement de temps, c’est un élément important du récit mais ça n’a rien de « hard-SF ». C’est juste le fait que la narration soit au présent tout en mélangeant les trames temporelles (passé, présent, futur) du fait du pouvoir de Taveth qui surprend un peu. Mais on s’y fait vite.
Un chouette livre ^^ Beaucoup aimé ce mix entre l’importance donnée aux relations entre les personnages, les histoires familiales et les thématiques plus générales comme la religion ou l’exercice du pouvoir.
Oui, Jo Walton n’a encore pas réussi à écrire un mauvais roman ! 😀
Pour ma part, je l’ai commencé et vite refermé. Ce n’est pas un texte pour moi. J’attendrai le prochain Walton. 😉
Ça ne peut pas fonctionner pour tout le monde… 😉
La couverture est superbe et le texte semble intéressant. Nul doute que je m’y intéresserais, mais pas tout de suite.
Oui, très belle couverture en effet, et ça change du visage semi-transparent sur paysage, un peu trop utilisé par Aurélien Police. 😉
Je pense que ce texte a de quoi te plaire. 😉
J’avais un peu zappé ce livre, c’est le premier avis que je lis dessus et ça m’a l’air très chouette.
J’avais adoré Morwenna mais rien lu d’autre de Jo Walton depuis, ça passera probablement par celui-ci 🙂
Comme pour Shaya, je pense que ce texte pourrait tout à fait te plaire. 😉
Et tant qu’à faire, tu devrais aussi lire « Mes vrais enfants ». 😉
J’ai eu presque l’effet inverse : j’avais lu des avis le présentant comme assez « inactif » et j’ai du coup été agréablement surpris, je m’attendais à bien pire – et je l’ai grandement apprécié. Oui, j’ose le dire : pour ce livre, les blogueurs ont été utiles. =P
Comme quoi les blogueurs ont une utilité. Au moins pour les autres blogueurs. 😀
Oui il y a de l’action, même si c’est à petite échelle. Mais ce n’est pas un roman « mou ».
Je vais d’abord tester son style avec Morwenna histoire de vider la PAL, je pensais le lire ce mois-ci mais finalement ce sera plus tard, trop d’autres choses à lire ^^
Le must de Jo Walton, ça reste « Mes vrais enfants » mais « Mowenna » c’est aussi un bon début pour voir si tu accroches. 😉
Et quoi ? Tu as beaucoup de livres sur ta PAL ? Quelle surprise ! 😀
BEAUCOUP TROP ^^
Beaucoup aimé pour ma part, y’a des passages qui m’ont beaucoup touchée. Après je comprends qu’il ne convienne pas à tout le monde, c’est assez particulier comme type de récit (pour de la SFFF).
En un sens, assez particulier, et en même temps pas si surprenant dès lors qu’on sait qu’il s’agit d’un récit de Jo Walton. Mais la narration au présent quelle que soit la temporalité de l’action surprend un peu c’est vrai.
Pour le reste, c’est un récit très humain, sur les relations entre les uns et les autres, quelque chose de très positif en fait.
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