Zapping VOD, épisode 63

Posted on 2 novembre 2021
Un zapping un peu spécial aujourd’hui, puisqu’il s’intéresse aux trois morceaux d’une même trilogie cinématographique, et quelle trilogie puisqu’il s’agit de Matrix. Trois films qui ont marqué leur époque, trois films qui ont été salués tout autant que décriés, trois films qui ont révolutionné les effets spéciaux, trois films qui ont fait turbiner les méninges des spectateurs. Trois films à revoir avant l’arrivée du très attendu Matrix 4 « Resurrections », le 22 décembre.

 

Matrix, de Lana et Lilly Wachowski

Le premier film, en 1999, fut un choc. Personne n’avait jamais vu ça (en tout cas pas de cette manière et pas synthétisé en un seul film), des effets spéciaux fous, un univers original et jamais vu à l’écran (ou presque, il y a évidemment eu des prédécesseurs qui ont amené à ce film des Wachowski), pour un résultat stupéfiant. Bien sûr, les amateurs de cyberpunk et de SF au sens large restaient en terrain plus ou moins connu, mais voir ça au cinéma avec un tel sens de la mise en scène, mêlant action et réflexion, et faisant œuvre de syncrétisme en réunissant manga, SF pure et dure, films d’arts martiaux, c’était un peu révolutionnaire.

Et si ça l’est forcément moins aujourd’hui, force est de constater que le film reste une vraie merveille. Doté, un peu comme pour le premier « Ghost in the shell », d’une sorte de pureté narrative (que ne parviendront pas à retrouver les deux suites), alternant avec aisance scènes explicatives et phases d’action spectaculaires, sans s’appesantir ni d’un côté ni de l’autre et offrant un contexte limpide qui permet au spectateur de plonger dans un univers extraordinaire, entre action, hacking et philosophie, « Matrix », même s’il accuse parfois un peu l’âge de certains effets spéciaux (le numérique se voit), est encore un vrai sommet cinématographique de mise en scène spectaculaire et d’action SF non dénué de réflexion. Culte !

 

Matrix Reloaded, de Lana et Lilly Wachowski

Arrivé en 2003, « Matrix Reloaded » était attendu au tournant. Faisant suite au premier « Matrix » (qui offrait des perspectives vertigineuses tout en se tenant très bien tout seul), le film a fait le pari de n’être « que » la première partie de la suite. Un parti pris qui joue un peu contre lui, puisqu’il est chargé d’amener tout un tas d’explications (qui en ont perdu plus d’un…) avant le grand final de « Matrix Revolutions ». D’où un rythme parfois un peu bancal entre scènes d’action à rallonge et tunnels explicatifs obscurs (pour certains).

Mais malgré tout, ce visionnage m’aura en quelque sorte ouvert les yeux : « Matrix Reloaded » n’a pas à rougir de la comparaison avec le premier « Matrix ». Certes, son rythme est donc moins maîtrisé, mais ça reste malgré tout un Matrix « plus plus ». Ou peut-être un « moins » Matrix « plus plus ».

« Matrix Reloaded » fait en effet plus fort sur bien des points : il approfondit son univers, plonge encore plus profondément dans la tréfonds de la Matrice pour en dévoiler certains rouages, et fait à nouveau la démonstration du talent des sœurs Wachowski pour la mise en scène de morceaux d’anthologie. Qui ne se souvient pas du combat contre les centaines d’agents Smith ? Complètement dingue, un vrai jeu vidéo, ahurissant à l’époque (et encore aujourd’hui). Et cette incroyable, énorme et longue scène de poursuite sur l’autoroute (oui je manque de superlatifs tant elle m’a encore époustouflé) ? A-t-on vu mieux dans le genre depuis ? Ça c’est pour le « plus plus ».

Et le « moins » ? Ça n’a rien d’un problème qualitatif, il s’agit plutôt de signaler que les Wachowski ont fait le choix risqué de prendre le contrepied de ce qui avait été présenté dans le film précédent. Tout ou presque de ce qu’on prenait pour acquis s’avère faux, et à l’image de Morpheus, c’est le désenchantement ou le désespoir qui domine alors que tout se rattachait à une prophétie qui n’a plus lieu d’être. Tiens tiens, une prophétie et un élu, « légendes » utilisées pour garder le contrôle, j’ai déjà vu ça sur une planète de sable, dans un genre différent…

Et donc oui, « Matrix Reloaded » est lui aussi un grand film, à l’action démesurée, qui prend le risque de défaire ce qui avait été fait tout en faisant encore plus fort sur presque tous les plans. A la fois forces et faiblesses : certains seront fatigués de tant d’action ou désespérés par ces discours obscurs, alors que les autres, les « vrais » ( 😉 ), seront aux anges face à ce film qui envoie du lourd, du très lourd, sans faire aucune concession.

 

Matrix Revolutions, de Lana et Lilly Wachowski

Et voilà la conclusion. Malheureusement le moins réussi des trois films à mon goût (mais il en faut bien un)… Fini les tunnels explicatifs, place au rush final, la guerre entre la cité de Sion et les machines, alors que dans la Matrice l’agent Smith se multiplie. La bataille de Sion est évidemment, en dehors du combat final, LA scène choc du film. Une scène un peu longue, en tout cas plus convenue que ce que nous avait offert le film précédent, une scène qui reste un gros moment de bravoure et d’effets spéciaux mais qui n’atteint pas la maestria des précédentes.

Et c’est un peu la même chose avec le tant attendu combat final entre Smith et Neo, qui atteint des sommets d’épicness mais qui pourtant ne convainc pas totalement. Parce qu’on en attendait plus ? Parce qu’on en a déjà eu beaucoup ? Parce que ce n’est pas la scène la plus lisible (entre éclairs épileptiques et pluie diluvienne) qu’ont pu nous offrir les sœurs Wachowski, même si elle est esthétiquement irréprochable ? Allez savoir…

Et « Matrix Revolutions » ne peut pas non plus se raccrocher à sa (ou ses…) résolutions puisque l’abandon des scènes explicatives laisse des brèches ouvertes sur un certain nombre d’aspects quand bien même on pourra se nourrir des nombreux thèmes abordés, notamment l’opposition entre déterminisme et libre-arbitre (je laisse les philosophes s’en charger).

On peut voir différentes choses dans la fin proposée par le film, forcément soumise à interprétation, et si je suis apte à m’en satisfaire, j’aurais aimé voir deux ou trois choses un peu plus explicites, alors que le trailer du prochain « Matrix 4 », qu’il faut forcément prendre en compte, amène lui aussi à se poser des questions sur ce qu’on a vu (le sort de Trinity ? Les pouvoirs de Neo : connexion directe à la Source ou Matrice dans la Matrice ? Une guerre entre machines (Oracle vs Architecte) ? La paix mais la Matrice rebootée quand même (d’où le titre de « RevolutionS », qu’il faut comprendre au sens physique du terme, comme des cycles, plutôt qu’au sens sociétal), ce qui nous amène à « Matrix 4 » ? Oui, je sais, le web regorge de théories plus ou moins farfelues…).

Une chose amusante à noter, c’est qu’après le retournement de la prophétie « à la Dune / Missionaria Protectiva » dans « Matrix Reloaded », on a maintenant un Neo qui est un Messie sans l’être vraiment et qui devient aveugle avant d’avancer, seul, vers le désert les machines. Décidément… 😀

En tout cas, quoi qu’on pense des films individuellement, on ne peut que reconnaître la puissance et la portée de cette trilogie. J’aurais aussi pu parler de la musique, de la photographie, des acteurs bien sûr, mais peu importe : elle a changé le cinéma, digéré de multiples influences (on pourrait s’amuser à les recenser mais on n’a pas fini…) pour devenir une œuvre à part entière influençant à son tour un tas d’œuvres postérieures, largement mérité son statut d’œuvre culte, mêlé comme rarement action et philosophie et (peut-être…) donné naissance aux films de super-héros modernes (oui parce que quand même, le dernier duel NeoSmith…). Oui bon, ok, ce dernier point n’est peut-être pas ce qu’on lui doit de plus notable… 😀

Une chose est sûre : les sœurs Wachowski sont pétries de talent, et on ne peut qu’espérer que Lana (seule à la réalisation cette fois) nous donnera un « Matrix 4 » qui explosera tous les curseurs. On n’en attend pas moins. Avec de vraies réponses si possible (mais je crois que je rêve là…).

 

  
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