Zapping VOD, épisode 64

Après un moment d’absence dû à un petit passage à vide et pas mal de documentation sur un sujet qui n’a rien à voir avec la SF (c’est d’ailleurs toujours en cours, ne vous attendez donc pas à des publications très régulières ces prochaines semaines), me revoici avec un petit zapping qui mêle une série qui bat tous les records, une autre qui s’est terminée il y a deux ans de cela après quatre saisons, et un documentaire sur un phénomène financier qui prend de plus en plus d’ampleur.

 

Squid game, de Hwang Dong-hyeok

La série à succès dont tout le monde parle, et qui a battu tous les records sur Netflix d’après ce que j’ai compris (je n’ai pas regardé les chiffres par moi-même). Une série ma foi fort « sympathique » si je puis dire, vu son sujet : une sorte de Battle Royale dont un seul des 456 participants (tous endettés à vie) peut sortir vivant, et empocher au passage une énorme somme d’argent.

Et si je ne ferai pas de cette série un chef d’oeuvre, elle a malgré tout un fond tout à fait intéressant et pertinent sur notre société, et sur les personnes qui la peuplent. Critique sociale sur ce que la société à fait des hommes (à moins que ce ne soit la nature humaine qui est visée…), elle en dit beaucoup sur nos réactions et sur ce que nous sommes prêts à faire pour survivre, ou plus simplement (et plus terriblement…) sur l’appât du gain. A ce titre, le fait que les participants choisissent de revenir dans le jeu, avec les risques mortels que cela comporte, plutôt que de retourner à leur triste vie endettée, est tout à fait éloquent…

Parfois surjouée à la mode asiatique (et c’est un peu pénible il faut bien le dire…), parfois très fine, touchante et dramatique (c’est clairement dans ces moments-là qu’elle brille le plus), se perdant également dans des sous-intrigues sans intérêt débouchant su un cul-de-sac (le flic infiltré…), « Squid game » souffle le chaud comme le froid. Pas de quoi créer un tsunami de hype, mais ça reste quand même une série à voir.

 

Le mystère Satoshi, de Rémi Forte

Documentaire signé Rémi Forte et disponible gratuitement sur Arte.tv (ainsi que sur Youtube), « Le mystère Satoshi » s’attache, par l’intermédiaire du créateur du fameux protocole (donnant son nom au documentaire ici présent), à faire découvrir au spectateur le bitcoin, cette monnaie numérique dont le simple fait qu’Arte s’y intéresse démontre une démocratisation et une acceptation de plus en plus avérées (quoique du côté des politiques et des institutions c’est encore loin d’être gagné). Rémi Forte nous propose ici une très belle synthèse sur le bitcoin, sa genèse, son créateur, son fonctionnement, ses avantages, ses inconvénients, son utilisation, ses dérives.

Tout commence logiquement par sa création, avec la volonté première de garder une vie privée sur Internet. On (re)découvre le mouvement cypherpunk et l’arrivée de nouvelles solutions technologiques (via la cryptographie) permettant la naissance d’un système de paiement électronique pair à pair, sûr, infalsifiable, décentralisé, autonome, sans intermédiaire, offrant donc à ses utilisateurs la possibilité de redevenir maîtres de leur argent, de devenir leur propre banque.

Le déclencheur fut bien sûr la crise financière de 2008 et la « découverte » que notre système financier est totalement opaque et parfois injuste (mais pas pour les plus riches…) et que le remplacer par un code informatique sûr, open source et décentralisé offre bien des avantages, dont la reprise en main d’une forme de liberté financière. Le documentaire aborde certaines dates importantes de l’invention de Satoshi Nakamoto, ce personnage insaisissable et anonyme : la parution du « white paper » fin 2008, le premier paiement en bitcoins début 2010 (deux pizzas pour 10 000 bitcoins, deux pizzas pour 500 millions de dollars au cours actuel !!), etc…

Certaines parties sont abordées succinctement : son fonctionnement « informatique » (la blockchain a droit a un peu de développement, la preuve de travail ou le minage un peu moins…), sa philosophie en rupture par rapport au système financier actuel (pas de nécessité d’un tiers de confiance, décentralisation, monnaie déflationniste, etc…). On pourra aussi regretter que la finance telle que nous la connaissons ne soit pas un minimum expliquée (école keynésienne vs école autrichienne, création monétaire par les banques centrales, inflation, dévaluation de la monnaie, des thèmes très actuels en ces temps de Covid) mais il est difficile de faire autrement devant la masse d’informations à traiter et le temps imparti. Ceci dit, tout y est, et tout y est clair. Ceux qui souhaiteront en savoir plus trouveront sans problème livres, sites web, podcasts ou vidéos pour plonger dans le terrier du lapin.

Le documentaire n’est pas là pour faire une apologie aveugle et subjective du bitcoin puisque les mauvais côtés ne sont pas passés sous silence : utilisation pour ventes d’armes ou de drogues, les envieux cherchant à endosser l’identité de Satoshi Nakamoto, les « copieurs » cachant des arnaques, la philosophie du bitcoin foulée au pied par les spéculateurs, les arrivistes et les cyniques (Mark Zukerberg et Facebook en prennent pour leur grade, étant en opposition totale avec la philosophie des cypherpunks sur la vie privée et donc du bitcoin). On remarquera tout de même que ce n’est pas le protocole Bitcoin en lui-même qui est pointé du doigt, mais l’utilisation qui en est faite et/ou les espaces qu’il ouvre pour des ersatz y compris gouvernementaux (la Chine mais pas seulement, l’Europe s’y prépare également) dont les buts ne sont pas très avouables…

« Le mystère Satoshi » est donc un passionnant documentaire d’un peu plus d’une heure (découpé en six épisodes), garni de punchlines bien senties, qui revient sur ce qui pourrait bien être une vraie révolution monétaire, monté sur un mode mi-interviews (avec certaines pointures du secteur des crypto-monnaies) mi-fiction animée (dans un style manga à la fois sobre et coloré inspiré du cyberpunk), avec un ton très thriller, aidé par ce mystérieux personnage de Satoshi Nakamoto, tout simplement l’un des plus riches de la planète. Du moins virtuellement puisqu’il (ou elle, ou eux, personne ne le sait) possède environ un million de bitcoins (ce qui, au cours actuel de la monnaie le place aux alentours de la 25ème place du classement des personnalités les plus riches de la planète), bitcoins auxquels il n’a jamais touché depuis sa disparition totale des réseaux début 2011… Alors, décès ? Volonté de rester en retrait de sa « création » pour ne pas offrir un point de « vulnérabilité » ou une influence disproportionnée ? Respect total et ultime de l’idéologie de départ ? Le mystère Satoshi reste entier.

 

Mr Robot, saison 1, de Sam Esmail

2015. Dans le monde des séries, c’est un peu la préhistoire. J’avais à l’époque entendu parler en termes élogieux de cette série qui avait tout pour me plaire, et je suis pourtant passé à côté. Ce n’était que partie remise puisque je m’y suis enfin mis.

L’histoire d’Elliot Alderson, informaticien et hackeur de génie, asocial, qui travaille dans une boîte de sous-traitance en cybersécurité et qui se retrouve engagé au sein d’un groupe de hackeurs, dirigé par un certain Mr Robot, pour faire tomber le client principal (une énorme méga entreprise, qui a des filiales plus ou moins directes dans tous les secteurs de l’économie) de son employeur.

Au début ça ressemble à une série pour les geeks informaticiens (et elle a d’ailleurs été salué pour son abord réaliste du sujet, malgré quelques inévitables concessions avec la réalité pour ne pas perdre le grand public), c’est d’ailleurs pour cette raison que je m’y suis penché (le premier épisode est tout à fait excellent là-dessus), et puis ça dérive vers quelque chose d’autre, entre idéologie anarchiste, critique sociale (surfant sur les mouvements Anonymous ou Occupy), chute de l’économie ultra capitaliste, et un autre élément à propos duquel je ne peux rien dire.

Car l’effet de surprise est essentiel. Et même si le truc en lui-même n’a rien de neuf (mais je tairais là aussi les influences de la série pour ne pas en dévoiler trop), une fois découvert le pot aux roses c’est à s’en décrocher la mâchoire.

Bref, c’est bien foutu sur tous les plans (et à propos de plans, la technique cinématographique de la série est remarquable, à base de cadrages décentrés et autres trucs faits pour déstabiliser le spectateur), la musique de Mac Quayle est top (pour les amateurs de la BO de « The social network » par Trent Reznor et Atticus Ross c’est du pain béni) et parfaitement dans le ton d’une ambiance anxiogène qui sied à merveille à la superbe prestation de Rami Malek autour duquel tourne toute la série. Un Rami Malek qui a d’ailleurs obtenu un Emmy Award bien mérité, avant d’exploser aux yeux du grand public dans « Bohemian Rhapsody » et de gagner un Oscar.

Bref, je me demande bien pourquoi j’ai autant attendu pour regarder ce « Mr Robot », série que son créateur Sam Esmail a planifié en avance du début à la fin, pour quatre saisons qui ne devraient donc pas s’éparpiller dans des directions inintéressantes juste pour faire durer le spectacle. Cette première saison est très prenante, et m’a travaillé un bon moment après son visionnage, grâce notamment à son twist qui force le spectateur à réfléchir à ce qu’il a vu. Excellent !

 

  
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