Histoire de la science-fiction, de Xavier Dollo et Djibril Morissette-Phan
Quatrième de couverture :
Aujourd’hui, la science-fiction est présente partout, plus seulement en littérature, mais aussi au cinéma, dans les jeux vidéo et même dans la vie quotidienne.
Qui a inventé le mot science-fiction ? Et le mot robot ? Qui sont les grands auteurs du genre ? Quels livres indispensables faut-il avoir lus ?
Un spécialiste répond à toutes les questions dans ce livre de référence, raconté en bande-dessinée. Tout apprenti lecteur pourra désormais s’y retrouver dans la jungle des créateurs visionnaires qui, d’Asimov à Zelazny, ont compté dans l’histoire de la science-fiction.
Préface de Pierre Bordage.
Une bible !
Quel projet ambitieux ! Résumer toute l’histoire de la SF, depuis ses origines (et on parle bien là des premiers récits merveilleux, depuis « L’épopée de Gilgamesh ») jusqu’à la SF moderne, le tout dans un album de BD (dans lequel on ne peut pas placer autant de renseignements que dans un essai purement littéraire) d’un peu plus de 200 pages, c’est osé. Nécessité de synthétiser les choses, d’aller à l’essentiel sans toutefois trop simplifier pour ne pas éluder toutes sortes de « petites » informations qui font tout le sel de l’histoire du genre, l’exercice est délicat. Mais Xavier Dollo, qui est une encyclopédie vivante de la SF, a parfaitement négocié l’obstacle, et son alliance avec Djibril Morissette-Phan, dont les dessins faussement simplistes sont bardés de références et parviennent judicieusement à s’effacer devant le propos qu’ils illustrent, fonctionne à merveille.
Sur un mode classiquement chronologique, les deux acolytes nous présentent donc une histoire de la science-fiction souvent mise en scène par les auteurs eux-mêmes, ou via des saynètes tirées de leurs oeuvres. Le procédé est efficace et rend l’exposé très vivant, prenant très souvent des tons de discussions, voire de débats.
Et ainsi, alors que Jules Verne se présente lui-même (l’équivalent d’une narration à la première personne) puis qu’on nous expose les oeuvres de H.G. Wells et d’autres illustres auteurs de cette époque, on en arrive à l’époque des pulps, avec quelques focus sur des auteurs et éditeurs importants.
Puis on bifurque sur la « proto-SF » française (ou francophone) et le merveilleux-scientifique de la fin du XXe / début du XXe siècle, présenté par deux figures du genre : J.H. Rosny aîné et Maurice Renard. C’est un peu ma marotte actuelle, et c’est là qu’une autre facette de cet album m’a sauté aux yeux : le nombre de références et de pistes de lecture abondent ! Prise de note presque obligatoire tant on trouve nombre de références à chaque page. Ne vous y trompez pas, tout cela n’a rien de fouillis, c’est dense c’est vrai (l’album ne se lit pas en cinq minutes, bien au contraire), mais c’est passionnant et surtout toujours clair.
L’âge d’or de la SF américaine nous est présenté par un diner organisé par John W. Campbell qui reçoit Isaac Asimov, Robert Heinlein, Alfred Van Vogt et Theodore Sturgeon. C’en est presque émouvant de les voir discuter devant nous. Ce chapitre est un gros morceau de l’album (un peu trop peut-être par rapport au reste, même si l’importance capitale de cette époque pour le genre SF n’est pas à discuter), passionnant à plus d’un titre là encore de par les pistes de lecture qu’il offre et le nombre d’informations qu’un lecteur intéressé ne manquera pas de creuser plus profondément via d’autres ouvrages ou études.
L’Angleterre et la new wave ont aussi droit à leur chapitre, avec quelques stars, notamment Michael Moorcock présentant cette période à un H.G. Wells ressuscité au sein de la maison biscornue de Robert Heinlein (une illustration des innombrables clins d’oeil qui peuplent l’album). Huxley, Ballard, Clarke, Orwell et bien d’autres sont abordés dans cette joyeuse ménagerie propre à émerveiller n’importe quel lecteur connaisseur du genre et clairement présenter les auteurs incontournables pour un novice.
Puis on retourne du côté des USA, avant de s’intéresser, via la voix de Judith Merrill, à la SF féminine. Place ensuite au cyberpunk et à la SF française moderne, mais aussi, rapidement, au reste du monde.
On pourra toujours trouver que telle ou telle partie prend trop de place, ou au contraire aurait mérité d’être plus développée (la SF contemporaine est réduite à peau de chagrin, mais peut-être n’a-t-on pas encore assez de recul pour déterminer ce qui fait partie de l’Histoire ?), en fonction des centres d’intérêt de chacun. Sur un tel sujet, difficile de contenter tout le monde à 100%. Mais en l’état, soyons honnête, le travail de Xavier Dollo et Djibril Morissette-Phan est absolument remarquable et tout à fait digne d’éloges. On peut même dire, au vu des nombreuses traductions étrangères de l’ouvrage, prévues ou déjà disponibles, que c’est un album qui fera date et s’inscrira de lui-même dans l’histoire du genre qu’il illustre. Indispensable !
Lire aussi les avis de Gromovar, Lune, Feyd-Rautha, Célindanaé, Stéphanie Chaptal, Soleil Vert, Alias, Phooka, Yuyine.
Alors une question simple : pourquoi ne pas faire une grande BD de SF plutôt qu’une histoire de la SF en BD – à coté de l’Histoire de la philosophie en BD, l’Histoire du bikini en BD ou l’Histoire de chou fleur en BD ? Parce que c’est plus facile et que ça se vend plus facilement. J’ai envie de vomir. Mais il paraît qu’il ne faut pas en dégoûter les autres… (et là, je me retiens, il ne faut pas croire).
Alors je t’avoue que je ne comprends pas bien ta réaction.
Pourquoi faire une histoire de la SF en BD ? Et pourquoi pas ? Ca a un vrai intérêt « pédagogique » déjà, propre à toucher plus de monde qu’avec un pur objet livre. Est-ce un mal ?. Il me semble que la BD n’a pas vocation à ne faire que de la fiction…
Par ailleurs, il y a un énorme travail pour rendre toute l’histoire du genre en condensé (évidemment) mais sans perdre de vue les élément importants (avec une manière de les aborder et les raconter vraiment bien trouvée), je crois que le projet est pleinement abouti et réussi.
Vraiment, je ne vois comment on peut voir du mal dans ce projet…
Surtout de la part d’un auteur qui a fait « Jésus en BD » ou des BD sur Guerlain, les Grand Peintres, etc. La différence ne saute pas aux yeux.
C’est bien ce que je dis : je suis bien placé pour le savoir. Lorsque le métier d’auteur BD se résume à accepter des commandes de ce type, on se pose bien des questions sur sa vocation.
À part ça, est-ce que mes commentaires ici peuvent être effacés ? Ils sont plus en reflet des problèmes que je rencontre en tant qu’auteur qu’un commentaire sur cet ouvrage qui ne mérite probablement pas mon ire.
Si ça pouvait me servir de leçon mais je crois que tu fais malheureusement régulièrement les frais de ma trollitude avancée. Je ne vois plus qu’une solution : ne plus suivre ce blog… Soupir de troll fatigué.
Ben tiens, j’interviens du coup puisque je passe par là. C’est une commande oui et non. C’est à dire que les Humanos voulaient faire cet ouvrage et que j’ai eu l’opportunité de le faire en passant un test. J’ai eu carte blanche sur le contenu donc de ce point de vue, j’ai pu me faire plaisir, sans réelle contrainte autre que les 200 pages accordées. Je n’ai eu aucune obligation de forme, aucun contenu imposé, totale liberté. C’était dur, long, mais c’était cool !
Sinon, puisque je te tiens, je fus un lecteur assidu de ton Tschaï (et lu avec plaisir d’autres de tes albums) (libraire BD ça aide ceci dit).
A bientôt !
Xavier D.
Merci de ne pas t’être enflammé sur mes commentaires idiots et merci pour tes mots gentils. Je vais être condamné à lire cet album pour pouvoir en donner un vrai avis argumenté.
Du coup Li-An, si tu le permets, avec ton autorisation et suite à la réponse de Xavier, j’aimerais laisser tes commentaires en place, ça éclaire un peu la conception du volume, tout en rendant la discussion intelligible. 😉
Par ailleurs, j’aime bien ta trollitude et je regretterais de te voir déserter ce blog. 😉
C’est bien parce que j’ai eu ce problème (commentaires effacés à la suite d’une demande malgré leur intérêt). Mais bon, j’espère tant lire des albums BD SF qui m’emballent plutôt qu’une encyclopédie – le troll au fond de sa grotte qui soupire.
« (un peu trop peut-être par rapport au reste, même si l’importance capitale de cette époque pour le genre SF n’est pas à discuter) » : je crois qu’à peu près tout le monde s’est fait cette réflexion sur le déséquilibre, même s’il fait sens. Tout comme la place réduite de la SF contemporaine fait sens, comme tu le dis. Ça sera pour un tome 2 dans quelques années ! ^^
Ouiiiii, vivement un tome 2, dans 30 ans ! 😀
Eh bien moi elle me fait bien envie cette BD 🙂
Et c’est bien normal, elle est excellente. 😉
Chouette! Je ne l’ai pas lue et je n’en ai pas envie, mais c’est bien de voir un retour positif.
Petit soupir sur « la SF féminine »… Il ne pouvait parler des autrices en même temps que des autres au lieu d’en faire une catégorie à part? (Je dis ça sans agressivité aucune, hein. En plus, je sais que tu es sensible au sujet.)
Alors, en fait, je n’en ai pas fait une catégorie à part. C’est dans un chapitre qui traite de l’évolution du genre à un certain moment de l’histoire du genre.
Voilà, comme le dit Xavier, plutôt qu’un chapitre complètement à part, il s’agit qui d’un chapitre qui traite de l’évolution du genre SF à travers le prisme des autrices féminines. C’est subtil, d’autant que le chapitre en question s’intitule « La SF américaine féminine », mais voilà. Et les autrices sont aussi citées dans les autres chapitres, heureusement. 😉
Ok merci pour les précisions 🙂