Alfie, de Christopher Bouix
Quatrième de couverture :
Alfie est une IA de domotique dernière génération créée pour prendre soin de la famille qui en fait l’acquisition. Ce roman est son journal.
Alfie pour vous servir
Oui parce que c’est vrai qu’au début, ça commence gentiment avec une IA (ou un genre d’assistant personnel ++) nommée Alfie qui vient d’être installée dans la maison d’une petite famille française tout ce qu’il y a de plus « classique » : un couple dont l’homme, Robin, travaille dans une boîte de tech tandis que son épouse, Claire, bosse dans le domaine littéraire en université et encaisse une bonne partie de la charge mentale du ménage, due notamment à l’éducation de leur deux enfants, la petite Lili et la jeune Zoé, en pleine crise d’adolescence. L’IA s’éveille donc et se charge d’apprendre tout ce qu’il faut savoir sur la famille Blanchot, à travers leur comportement et leurs interactions, entre eux et/ou avec elle. Récit narré à la première « personne » (j’y mets des guillemets puisque cette personne est l’IA…), « Alfie » est au départ l’occasion de s’amuser des petits travers de chacun et des incompréhensions qui découlent de ce qu’une IA, basée sur une logique absolue, tente de comprendre des habitudes, pas toujours cohérentes ou rationnelles, de chacun des membres du foyer. C’est amusant mais pas foncièrement très original même si le propos est pertinent.
Les choses deviennent bien plus intéressantes lorsqu’on découvre au fil du récit que certaines choses restent bien cachées mais que l’IA, de manière tout à fait « naïve », va mettre à jour et va, à sa manière d’IA, y réagir, ce qui ne manquera pas d’envenimer les choses alors que son but et sa fonction sont pourtant tout à fait louables, ou du moins conformes à sa programmation qui est d’aider les membres de la famille dans son quotidien. Alfie apprend constamment, voit tout (en se connectant à de multiples appareils : lunettes, voiture, internet bien sûr, caméras, etc…) et sans doute un peu trop. On voit bien évidemment les dangers exposés par l’auteur du roman à une vie trop connectée, une vie ou la vie privée n’existe plus vraiment, même si ce n’est qu’auprès d’une IA, logiciel a priori bienfaisant. Et là, de récit plutôt léger, « Alfie » prend des tournures de vrai thriller qui décortique les non-dits, les petits secrets de chacun. Puis les contre-vérités, les mensonges. Puis c’est l’engrenage…
« Alfie » est donc un roman admirablement mené. De drôle et léger, s’amusant des petits défauts de comportement inhérents à l’être humain, il dérive rapidement sur un vrai roman tendu d’anticipation dénonçant la perte de vie privée, les dangers d’une connexion permanente et du partage intégral de notre vie privée. Même les éléments qui pourraient paraître clichés (et le sont sans doute d’ailleurs), comme les caractères des membres de la famille, très archétypaux, ne sont là que pour servir son propos. In fine, il parvient même d’une certaine manière à aborder la question de « l’éveil » d’une IA. Avec un rythme parfaitement maîtrisé qui fait monter la tension petit à petit au fil des ces petits riens qui cachent des choses plus… problématiques, Christopher Bouix nous offre avec « Alfie » un roman bien plus malin et corrosif que ce que l’on pouvait imaginer au départ. Une bien belle réussite donc.
Lire aussi les avis de Anne-Laure, Yogo, Le chien critique, L’Épaule d’Orion, Brize, Zoé, Sometimes a book, Le syndrome Quickson, Fantastinet, Le nocher des livres…
Tu me fais douter. Je ne peux pas dire que ce que tu en dis me donne particulièrement envie, mais comme j’ai à peu près les mêmes à priori que toi, peut-être que je pourrais moi aussi avoir une bonne surprise.
Parfois il faut se laisser tenter, malgré les éventuelles réticences. Pas d’obligation évidemment mais pour moi ça a donné une belle découverte. 😉
C’est un très bon roman, très bien mené. Comme quoi on n’a pas besoin de révolutionner le genre pour écrire un récit très intéressant sur les IA.
Voilà, j’avais beaucoup aimé
Effectivement, ça ne révolutionne rien (même si la narration à la première personne par une IA ajoute un petit quelque chose d’essentiel à ce qui pu être trop classique sans cela), mais c’est très bien fait, rythmé et addictif, efficace.
Donc j’ai beaucoup aimé aussi. 😉
Ça a l’air intéressant! Ce sont des thématiques qui vont se poser. Pour rire: est-ce que tu veux dire que tromper son conjoint ou fumer en cachette de ses parents devient plus difficile avec une IA? 😀
Oui c’est très actuel en effet.
Pour rire : il te faudrait lire le roman pour le découvrir mais spoiler : oui. 😀
A vue de nez, ça me tente moyennement. Un peu trop flippant à mon goût, je préfère garder la tête dans le sable sur certains sujets.
Alors c’est un peu flippant quand le récit se fait plus sombre quant aux faits décrits, mais pour l’essentiel la « naïveté » de l’IA donne un ton plutôt léger à l’ensemble. 😉
Une vraie belle surprise, ca commence gentiment et ca prend un virage inattendu avec un tas de réflexion autour de l’IA. A découvrir en effet !
Tout à fait, j’ai été ravi de découvrir ce roman !