Le sang des elfes, Le sorceleur tome 3, de Andrzej Sapkowski

Posted on 3 janvier 2020
La série « The witcher » de netflix arrive ! Pas question pour moi de me laisser distancer car j’ai toujours préféré lire les romans avant les adaptations. Et puisque les deux premiers tomes (1 et 2) m’avaient laissé une bonne impression, autant continuer, histoire d’être sûr de ne pas me faire spoiler les romans par la série. Alors hop, le tome 3 !

 

Quatrième de couverture :

Le royaume de Cintra a été entièrement détruit. Seule la petite princesse Ciri a survécu. Alors qu’elle tente de fuir la capitale, elle croise le chemin de Geralt de Riv. Pressentant chez l’enfant des dons exceptionnels, il la conduit à Kaer Morhen, l’antre des sorceleurs. Initiée aux arts magiques, Ciri y révèle bien vite sa véritable nature et l’ampleur de ses pouvoirs. Mais la princesse est en danger. Un mystérieux sorcier est à sa recherche. Il est prêt à tout pour s’emparer d’elle et n’hésitera pas à menacer les amis du sorceleur pour arriver à ses fins…

 

Geralt de Riv et compagnie

Ce tome 3 est la suite directe de la dernière nouvelle du tome 2, et est donc le premier roman de ce qui est qualifié de « La saga de Geralt », même si après la lecture, il apparaît évident qu’avoir lu les deux premiers recueils est un plus non négligeable, si ce n’est tout simplement un passage nécessaire et obligé. Difficile en effet de faire l’impasse sur des récits qui ont introduit des personnages et un contexte qui commence ici à prendre toute son importance. On retrouve donc Geralt qui décide d’emmener Ciri à Kaer Morhen, la forteresse en ruines des sorceleurs, pour la protéger de ceux qui sont prêts à tout pour retrouver l’héritière du trône de Cintra.

Alors certes, ce volume lance vraiment les hostilités, mais sur un mode piano-piano… C’est pourquoi le pitch du roman est réduit à peau de chagrin. Comme Si Andrezj Sapokowski avait voulu, à nouveau, introduire un certain nombre de choses en douceur, pour les éventuels nouveaux lecteurs. Les évènements ne se précipitent donc pas, le récit prend son temps, mais jamais l’ennui ne s’installe. Car on continue à prendre plaisir à partager la vie de ces personnages consistants, plein de failles, de doutes. Des personnages travaillés, avec notamment des femmes régulièrement mises en avant. Et quelles femmes ! Entre la jeune et plein d’assurance Ciri et les magiciennes pleines de caractère Triss Merigold et Yennefer, on peut dire que Geralt a trouvé du répondant ! D’ailleurs, Sapkowski n’hésite à faire passer son héros au second plan, les autres personnages prenant alors toute leur importance (notamment au début du roman, où Geralt est peu présent, idem à la fin).

 

Un roman pas tout à fait roman

Le récit, tout roman qu’il est, a bien du mal à se départir de la structure des deux tomes précédents. Sapkowski change de lieux régulièrement d’un chapitre à l’autre, et les ellipses temporelles ne sont pas rares. Un chapitre fait donc parfois office de récit quasi indépendant, inséré dans un contexte plus vaste qui ne cesse de prendre de plus en plus de sens au fil de la lecture. Ainsi, les chapitres sur l’escorte du convoi des nains ou bien l’apprentissage de Ciri avec Yennefer sont presque « hors cadre » sans jamais manquer d’intérêt. On pourra toutefois trouver surprenant d’avoir placé la scène CiriYennefer en toute fin de roman, ce dernier se retrouvant du coup littéralement sans climax, le gros de l’action se déroulant au chapitre précédent. Mais encore une fois, sur le strict plan de la construction d’une intrigue plus globale et du worldbuilding (voire du character bullding), cela ne gène en rien.

 

Des thématiques pertinentes

On retrouve dans ce roman certains des thèmes déjà abordés dans les volumes précédents, comme cette approche du « moindre mal » et de cette neutralité affichée à laquelle s’accrochent les sorceleurs. L’arrivée fracassante de la magicienne Triss Merigold à Kaer Morhen est à ce titre remarquable : son coup de gueule plein d’émotion sur le recul volontaire que prennent les sorceleurs par rapport aux évènements qui bouleversent le monde et son engament personnel au sein de la guerre en cours est une des meilleures scènes (si ce n’est LA meilleure scène) du roman, du genre marquante et qu’on n’oublie pas de sitôt. On pourrait aussi citer cette intéressante approche des discriminations avec les minorités autrefois puissantes (elfes et nains en tête) désormais opprimées par les humains arrivés plus tardivement dans ce monde, avec pour résultat le soulèvement de quelques représentants de ces peuples anciens, un phénomène qui pourrait bien avoir de l’importance dans la trame globale.

 

La vitesse supérieure pour le tome 4 ?

Alors c’est vrai, tout cela se lit avec un plaisir certain mais on ne peut objectivement pas passer sous silence le fait que même s’il se passe des choses (les intérêts des uns et des autres et les machinations et négociations afférentes commencent à apparaître), le roman ne présente pas encore d’évènements significatifs, en tout cas pas à la hauteur de ce qu’on attend alors qu’on nous dit que la guerre gronde (après tout Cintra a été envahit et le monde est sur le point de basculer sous le joue des légions de Nilfgaard). Oui, « Le sang des elfes » résonne lui aussi comme une grosse introduction à la suite. Introduction agréable, très agréable même, mais à un moment il va falloir entrer dans le vif du sujet. On notera également quelques grosses facilités narratives, comme le fait de rendre Triss Merigold malade (sans réelle cause apparente…) à un moment opportun pour Sapkowski, là ou sa puissance aurait pu faire la différence. À ce moment précis, la présence de Triss Merigold a semblé gêner l’auteur, et sa manière de se débarrasser de cette difficulté est un peu trop facile et voyante.

Ceci dit, je ne boude pas le plaisir pris à la lecture du « Sang des elfes », qui continue de densifier un monde qui a décidément beaucoup à offrir et d’étoffer des personnages intéressants, variés et faisant la part belle aux personnages féminins d’importance. Arpenter ce monde en leur compagnie est un vrai bonheur, et j’ai déjà hâte de plonger dans la lecture du volume suivant. Voilà bien une série que je n’imaginais pas me plaire à ce point. La surprise n’en est que meilleure. Mais avant de passer au « Temps du mépris » (le tome 4), il y a la série Netflix, ce dont je vais vous parler très prochainement. 😉

 

Lire aussi les avis de Mr K, Christophe H., Les pages qui tournent, Shoop.

 

  
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