La digue, Blackwater tome 2, de Michael McDowell

Posted on 6 mai 2022
Deuxième tome de la saga « Blackwater » écrite par Michael McDowell il y a presque 40 ans de cela et traduite pour la première fois en France en 2022 par les éditions Monsieur Toussaint Louverture. Le premier tome avait montré qu’à l’évidence l’éditeur comble un manque tant la « surprise » s’avère agréable. Encore faut-il que le niveau ne faiblisse pas au fil des volumes. Début de réponse avec « La digue ».

 

Quatrième de couverture :

Tandis que la ville se remet à peine d’une crue dévastatrice, le chantier d’une digue censée la protéger charrie son lot de conséquences : main d’œuvre incontrôlable, courants capricieux, disparitions inquiétantes. Pendant ce temps, dans le clan Caskey, Mary-Love, la matriarche, voit ses machinations se heurter à celles d’Elinor, son étrange belle-fille, mais la lutte ne fait que commencer.

Manigances, alliances contre-nature, sacrifices, tout est permis. À Perdido, les mutations seront profondes, et les conséquences, irréversibles.

 

De Nantes Perdido à Montaigu Blackwater, la digue, la digue…

*  Chronique garantie sans spoiler !  *

Oublions ce titre désespérant (mais il fallait bien trouver quelque chose…) pour nous intéresser à ce deuxième volume de la grande aventure éditoriale printanière des éditions Monsieur Toussaint Louverture, à savoir la parution, en poche et en feuilleton (respectant ainsi quasi parfaitement le mode de parution en VO en 1983, qui était alors d’un volume par mois), des six romans constituant la saga familiale et fantastique « Blackwater ». Une saga qui, au-delà de son modèle éditorial, reste aussi pour Michael McDowell une belle prouesse d’écriture puisqu’il a écrit la totalité de la série en six mois (au printemps et à l’été 1982), pour une parution étalée sur le premier semestre 1983.

Un modèle feuilleton qui n’avait plus vraiment la cote dans l’édition (en tout cas pas pour des parutions « de masse ») depuis « La ligne verte » de Stephen King en 1996, l’oeuvre du King devant justement beaucoup à celle de Michael McDowell, lui-même décédé en 1999 à l’âge de 49 ans. Et le risque éditorial pourrait bien être un coup gagnant, en tout cas qualitativement puisque « La digue » poursuit dans la lignée de « La crue », à savoir que c’est encore une fois très bon, encore une fois ça se dévore rapidement, encore une fois les manigances familiales de Mary-Love se confrontent à l’étrangeté d’Elinor tout en devant faire avec l’arrivée de certains éléments extérieurs qui viennent s’agréger et prendre leur part dans cette atmosphère moite et parfois étouffante (au sens propre comme au figuré).

La situation du premier tome évolue donc naturellement comme au sein de n’importe quelle famille, intérieurement comme extérieurement, les deux étant liés (comme avec la construction de cette fameuse digue censée dompter les eaux des rivières Perdido et Blackwater, un élément qui dérange fortement Elinor et sur lequel, constatant cela, Mary-Love va évidemment appuyer).

La recette reste donc la même que dans « La crue », et après tout, pourquoi changer une formule gagnante alors que le « but » reste toujours de raconter sur quelques années le destin de la famille Caskey et à travers elle de toute la communauté de la ville de Perdido ? Manigances donc comme je l’indique plus haut, coups bas, trahisons, alliances de circonstances, drames, retrouvailles, naissances, morts, transformations urbaines, mariages, le menu est copieux ! Mais avec une science consommée de la narration, Michael McDowell parvient à rendre tout cela très digeste et même diablement addictif !

Et tant qu’à parler de diable, sans aller jusqu’à un tel extrême, on constate toujours l’omniprésence de l’élément fantastique, toujours discret, toujours au second plan, qui semble même s’effacer mais qui, comme dans le premier volume, ne manque pas d’exploser dans une scène horrifique rappelant aussi que ce genre littéraire n’est pas qu’une portion congrue de l’ADN de « Blackwater ». Spectaculaire oui, donc, parfois, mais aussi simplement malaisant, inquiétant, comme dans l’excellent ultime chapitre qui pose une ambiance magistrale sans montrer quoi que ce soit.

Bref, ça fonctionne extrêmement bien (et l’objet-livre est encore une fois splendide, avec une couverture, toujours signée Pedro Oyarbide, aux multiples détails issus du roman), et je ne vais pas manquer de poursuivre l’aventure. 1929 approche, et les (r)évolutions que cette année va apporter ne manqueront pas de faire bouger les lignes dans cette famille de riches propriétaires et d’entrepreneurs. Le troisième tome, « La maison », sort le 5 mai et… c’était hier ! 🙂

 

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